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Photographiez vos proches
Je ne pense pas qu’il faille séparer vie professionnelle et vie personnelle. Nous n’avons qu’une seule vie, et s’il nous faut compartimenter certaines facettes de notre quotidien, c’est probablement parce que l’une de nos « vies » ne nous convient pas. Vie professionnelle et vie personnelle ne doivent pas fusionner totalement, mais il peut — et doit — y avoir des interactions, des zones de contact, des échanges.
De la même manière, je ne pense pas que nous ayons intérêt à séparer notre vie de famille de notre passion pour la photo.
« A long time ago, when my family was young I made photographs of them that were separate from my so called, ‘tougher’ street work, but then I learned that family life needn’t be treated any differently than the everyday world. » — Joel Meyerowitz
(Traduction : Il y a longtemps, quand ma famille était jeune, j’en faisais des photographies qui étaient distinctes de mon travail de rue soi-disant « plus difficile », mais j’ai ensuite appris que la vie de famille n’avait pas besoin d’être traitée différemment du monde quotidien.)
Vos proches sont des sujets que vous pouvez approcher, observer et photographier comme aucun autre sujet sur Terre.
Bien entendu, ce ne sont pas les récits de vos vacances qui nous intéressent — il n’y a rien de plus ennuyeux que de regarder les 500 photos que vous avez prises cet été au camping de Quiberon —, mais plutôt les émotions et les relations que vous pouvez capter et retranscrire à travers vos photos.
L’émotion que vous ressentez en voyant votre enfant rire ou pleurer est universelle. Si vous photographiez cette émotion, si vous arrivez à la capturer, le public la ressentira — en imaginant par exemple que c’est leur enfant qui est en train de pleurer.
Ne vous empêchez pas de photographier votre famille ou vos proches en pensant que ces sujets n’intéresseront personne d’autre que vous.
Par contre, soyez extrêmement vigilant au moment de faire votre éditing, car beaucoup de ces photos n’ont d’intérêt que pour vous et vos proches.
Est-ce que le public, qui n’assistait pas à cet évènement, et qui ne connait pas personnellement votre enfant, sera capable de comprendre et de ressentir des sentiments devant cette photo ?
Est-ce que vous ressentez des sentiments parce que c’est votre fils sur la photo, ou est-ce réellement votre photo qui transmet ces sentiments ?
Vous devez garder à l’esprit ces questions au moment de sélectionner vos photos, c’est extrêmement important.
Comme je l’explique dans mon livre L’art de l’éditing, le temps est votre meilleur allié quand il s’agit de faire une telle sélection. Il vous permet de vous détacher sentimentalement de vos photos. De prendre du recul. D’observer votre travail avec un regard bien plus neutre. De vous mettre à la place du public, en mettant de côté le père ou de la mère de famille que vous êtes.
(Joel Meyerowitz est l’un de mes photographes préférés. En 2015, il a créé un blog et y a publié une photo par jour pendant un an. En le découvrant, je me suis souvenu des mots de Sénèque, le philosophe stoïcien : « Tu dois choisir un nombre limité de maitres-penseurs, et te nourrir de leur génie, si tu veux en tirer des idées qui resteront ancrées dans ton esprit. ». J’ai alors décidé de lire l’intégralité du blog de Joel Meyerowitz, en prenant mon temps, et de partager avec vous toutes les idées que cette lecture pourrait faire naitre dans mon esprit. C’est ainsi qu’est né le projet « A second time around the sun », dont l’article que vous venez de lire fait partie. L’intégralité du projet est à votre disposition ici : a second time around the sun.)